De
Grenoble
à
Roma
Vendredi 27 juin, le tract, le stress, la pétoche avant de partir.
Les premiers tours de roue. Les sacoches bien accrochées, un peu plus lourde
(12 kilos !) Les fidèles compagnes. Déjà chaud, en montant vers Monestier, un
passage à l’ombre, de l'air au col du Fau, des encouragements, des filles
partent en vacances dans une voiture et je bascule dans les méandres de cette
belle route panorama sur les Ecrins, l’Obiou, les Dolomites de l'Est du
Vercors, Saint-Michel les Portes, le week-end avant, j'en avais déjà plein les
pattes, le fameux café de Grenoble Nice. Un peu moins froid aujourd'hui !
Petite halte au col de
Accueil
sympa, familial. Chambre donnant sur un jardin et le Buech à côté. De l'autre
côté, un autre fleuve de voitures qui font entendre leur bruit sourd. Un peu de
vent, moins chaud que prévu, me dit la patronne en me faisant visiter la
chambre. Emporté par le Buech. Je pique une tête enfin allongé dans l'eau pas
si froide que ça. Un tour au O’Becassier, un bar du centre du village mi
extérieur sous les canices. Il me manque un compagnon pour ne pas me poser la
question, pourquoi je suis parti dans cette aventure ? Fais-je parti comme le
chien qui vient me voir des bécassiers ?
Samedi 28 juin, grand beau, les oiseaux qui piaillent dans le
jardin. Le patron aussi qu’on n’arrête pas avec ces sentences. Monsieur., je
vous affirme ceci, vous vous trompez. Ou « comment ? » De sa grosse
voix péremptoire. Comme hier soir, seul à me faire servir par lui comme un
prince, seul dans la salle face à eux, elle faisant des jeux et lui à côté me
déballant toutes ces certitudes de vieil homme sage faisant sa leçon. Au revoir
donc à ce vieux couple qui continue son train train comme s'ils ne s'étaient
pas aperçus qu'il n'y avait plus personne qui s'arrêtait dans leur auberge.
Arrêt à la fontaine du village et c’est partie. Le vent se lève et je gonfle
les voiles. Les lignes droites de Serres jusqu'à Laragne lancent bien l'allure.
Sisteron, citadelle, il y a un an, on a retrouvé le sourire en même temps que
le soleil. Château Arnoux, toujours bonne allure sous les platanes qui me font
cortège. Arrêt au-dessus du barrage sur
Dimanche 29 juin, sur la route du temps, le train des pignes, le
train qui prend le temps. Champ de sauges ? En fleur. C'est ça qui sent si bon
? Les genêts d'or. Le défilé de Chabrières. L’Asse qui s'y faufile. Grandioses
rochers. Barème, un peu lassant ces lignes droites en faux plat montant et du
vent avant d'y arriver. L'arche du col des Lêques
avant de
redescendre sur Castellane. La statue sur le rocher, pas le temps d'admirer.
Pas le temps de répit. Ça remonte sur le col de Luens et puis encore un avant
de prendre la route de Gréolières. Quel paradis champêtre, prés verdoyants, ses
étangs. Paradis des pique-niqueurs dans les sous-bois. La route en corniche
plonge sur Gréolières,
tout
aussi accroché et splendide. Il faut encore chercher des forces du diable
vauvert pour découvrir Coursegoules tout aussi joli et arrivé au col de Vence
enfin. Un petit panneau de rien du tout. Tout ça pour ça. Plongée sur les pentes
désertiques vers Vence, Cagnes-sur-Mer. Embrouillamini de route, d'autoroutes.
Nice, les plages, les baigneurs à touche touche, le Negresco, pas de photos
devant, trop fatigué. La basse corniche avant de prendre la montée du Mont
Boron pour un final, chemin de croix, accompagné par les cigales jusqu'à
l'auberge de jeunesse qui ouvre enfin ses volets. Nuit d'une traite allongée
comme une souche morte malgré le bruit, malgré la chaleur.
Lundi 30 juin, reparti, pas trop fatigué malgré cette journée
dantesque d'hier. La mer et l'horizon, les collines se mêlant dans un bleu
pâle. Redescente dans le port. Il faut tout remonter. Nice dans l’enfer de la
circulation, du bruit. Villefranche-sur-Mer, une mouette qui caquette sur un
mur. Un peu de répit avant un autre passage difficile, Monaco, ses yachts, son
luxe dégoulinant, ses hautes tours qui se moquent de la mer toute proche.
Menton, enfin et la frontière italienne où je bascule vers l'inconnu. Des
tunnels aux mille dangers. De petits villages sympas. Des rivières échappées de
la montagne, un peu de fraîcheur en passant. Des scooters, des petites
camionnettes à trois roues, ça y est, je suis bien en Italie. San Remo mais
c'est pas l'arrivée sur via Roma, Imperia, plein d'embouteillage. De petits
ports, des plages, des rochers où les gens se baignent dans une mer turquoise
transparente. Capo di mimosa. Ça doit être beau tout fleuri. La chaleur dans
ces capos puis l'air plus frais marin avant de recommencer. C'est comme une
ritournelle sans fin. Aurélia, les pieds me brûlent, la faim aussi. Je m'arrête
en bord de plage.
Un
cycliste de la ville m'accompagne après avoir mal compris mon accent
« hôtel Pescetto » grand luxe, grazie mille. La soeur, le frère que
j'ai eu au téléphone, la mère Ca y est, c'est la réalité et la chambre
bienfaitrice après cette journée éprouvante sous la chaleur.
Mardi 1er juillet, ciao, ciao à mon hôte si
sympathique. Chaud, déjà, dès le matin. Pas de brise de mer. La circulation.
Embouteillages dans les traversées. Enfin, un peu d'espace après Finale Ligure,
petite plage dans des criques entrecoupées de falaises qui plongent dans la mer.
Noli, quels lauriers-roses et les palmiers le long du front de mer. Dans un
parc ombragé, à l’abri de la route et de ses tumultes, face à la mer, une île
pyramidale où tournoient les mouettes. Savona, ses embouteillages dans ses rues
étroites, attention à tout, montée avant Franzano puis plongée sur Genova, ça
commence comme Savona mais ça s’amplifie, le port, la gare puis de nouveau de
gros bateaux. Genova, l'arrivée de la route de la soie, mais où sont donc
passés ces beaux voiliers ? La traversée est interminable. Des tunnels dans la
ville semblent mener tout droit vers l'enfer. Chaque fois, le vrombrissement
des moteurs derrière moi qui me poursuivent comme des monstres, peut-être la
fin et puis non, je survis comme un miracle à chaque fois renouvelé. La bonne
source avant Nervi. A l’ombre, une fontaine d'eau fraîche qu’on m’indique
cachée dans les arbustes. Les baigneurs en bas semblent l'ignorer plongeant
dans la fraîcheur de la mer. Un homme allongé sur un bar en train de fumer,
aussi. Marchands de fruits. On ne vent que des pastèques entières ! Ça
serpente le long de la mer avant d'attaquer la rude côte de Rocco en pleine
chaleur 37° ! C'est le Giro, c'est le final accompagné par les cigales et les
oliviers. Là-haut, on bascule vers Santa Marguerite. Encore une fontaine,
tunnels et hop c’est la descente, sublime panorama sur Santa Marguerite,
les toits
rouges, les palmiers et les jardins ornés de mauves qui plongent dans le bleu
de la mer. Je demande mon hôtel, un monsieur de Grenoble, quelle coïncidence,
miracle du destin !. Il faut remonter Ca y est.
Mercredi 2 juillet, le calme, les oiseaux gazouillent,
le train quelquefois trouble cette harmonie dans les entrailles de
Jeudi 3 juillet, éruption du Vésuve en pleine nuit, des érections
qui n’en finissent plus. Le point bleu, je le perds, je le retrouve avec
plaisir, montée puis belle ligne droite avant Lucca, couvert mais chauds. Le
mur d'enceinte Vauban ? Avant d'entrer sur la grande piazza et son église,
magnifique basilique à colonnes. Au bout d'une ruelle pavée, une tour rouge
avec des arbres dessus. Un cappuccino avec Jan sur la piazza. Ciao ciao à Roma
! Perdu dans Lucca. Je n'ai plus mon GPS, je n'ai plus mon point bleu. Dur de
se retrouver tout seul. Des oliviers dans la verdure, typique de l'Italie.
Montée casse-pattes avant Altopascio, Fucacchio que je continue sous les
platanes, ouf, ça fait du bien. Route de Castelfiorentino à droite. Un bar au
frais. Le paradis. Des monsieurs lisant leurs journaux. Castelfiorentino. Des
pins parasols qui me font cortège. Couvert. lourd. Certaldo, le château rouge
sur la colline. L'Elsa aux yeux verts en passant dessus. San Gimignano,
direction. Je m’attend à voir les tours fameuses comme un chevalier au bois sa
belle. Les cyprès alignés qui mènent aux propriétés en haut des collines, les
oliviers, les vignes, c'est
Vendredi 4 juillet, des rêves, le GTA ? L'érruption du
matin, six heures dur dur. Plus de carte bleue ! Carabinieri, hôtels, des
passants, le coiffeur, tout Val d’Elsa est au courant. Retrouvée ! C'était le
restaurateur qui me l'avait gardé et me la tend, mon sésame que j’avais perdu.
Grazie Mille. Tard quand je pars, déjà chaud. Petite montée vers le village
fortifié de Monteriggioni puis Sienna, les rues pavées et la formidable entrée
en vélo sur
Souvenirs,
souvenirs. Dommage que les policiers casques coloniaux blancs me disent de
descendre de mon cheval. Cavalier dans l'arène, je me croyais. Par la puerta
Romana, j'en sors vers Buonconvente. Arrêt bar. Chaud. Ça se couvre. Je n'y
crois pas mais le dieu Aqua m'a écouté. Il déverse sur moi tout un déluge qui
me rafraîchit avant San Quirico d’Orcia et sa forteresse. Le paysage toscan de
peintures à
Samedi 5 juillet, la cathédrale d'Orvieto recommandée par Jan pour
commencer la journée. Nef immense avec des colonnes à frise, pierres blanches
et grises donnent un effet de relief, des dames fleurissant l’autel pendant que
d'autres entonnent leurs prières.
Quelle
imposante beauté, grande dame en corps sculptée, ses fresques et ses flèches s'élevant
vers le ciel. Montée interminable. Buon respire sous les pins, on monte au ciel
? Montée jusqu'à Montefiascone, verdoyant, luzerne et blé. Redescente enfin
quasiment jusqu'à Viterbo. Arrêt au café Grandori, sur le place où trône une
belle fontaine, en arrivant de la porte de la ville. Beaucoup de costard
cravate, lunettes noires, la classe Aldo Macione ? Vatralia, montée dans un
verger de noisetier ? Capranica, une fontaine, je me jette dedans, je quitte
ensuite la grande route pour Bassana Romana, genre chemin creux avec monté
casse-pattes jusqu'à Orvioli Romana. Arrêt bar des sports, la jeune fille au
bar s'amuse en essayant de comprendre ce que je veux, sirop grenadine ?
Finalement c’est jus de fruits avec glace, un délice. Marziana, Brasciano, ça
descend à fond la caisse. Pas de lago di Brasciano dans la campagne verdoyante
avait quelques vaches. Osteria Nueva, circulation plus dense,, vent dans le
dos. Via Cassia, je m'attends à voir la pancarte Roma bientôt. Centre de Rome
indiqué de deux côtés. Je prends une grande voie, c'est la voie Triomfale.
Dernier arrêt fontaine ou je fais une prière à la déesse Aqua. Larges avenues
où les voitures semblent m’amener irrésistiblement vers mon but. Les pins
parasols. Je demande le Foro Italico. Il faut revenir vers le Stadio Olympico.
Avant une grande descente, vue sur la ville au-dessus d'un jardin d'olivier.
Une église, des monuments, pas de Saint-Pierre en vue. Stadio olympico et son
architecture futuriste, insecte à grandes pattes blanches, j'en fais le tour.
Après moult demandes, un bâtiment blanc sobre, c'est l’Albergo dei Jovento,
ouf, c'est là ! C'est fini, je suis à bout comme au bout du chemin. Le soir, le
pont du duc d’Aoste sur le Tibre ou je pourrais plonger.
Dimanche 6 juillet, chaleur, bruit dans la nuit, la
porte, le lit qui grince, les discussions de bon matin, on se lève. Ce n'est
pas le château de Sainte-Marguerite ! Dehors, ciel bleu si pur. Les rues pavées
le long du Tibre, je demande vaticano à un monsieur agé en VTT (
orné par des fontaines entourant une
obélisque. Une cloche grave sonne 11 heures... Et il est apparu sur quatre
écrans géants à 12 heures précises, le soleil au zénith. Sur le balcon de
CastelGondolfo, le pape Benoit XVI dans sa tenue papale blanche apparut. Les
petites cloches joyeuses s'agitent en haut de San-Pietro,. Il est midi sur la
piazza San-Pietro,. Bénédicta. Le pape joint ses mains Gloria in Patri, Filii
et Spiritu Sanctu, trois fois. Le pape bénit avec ses mains. J'espère que mon
vélo appréciera ! La foule en liesse applaudit. En Allemand, avec son micro au
dessus de la bouche, on dirait Hitler et sa célèbre moustache prononçant son
discours !
Agréable
ombrage sous les platanes pour entrer à l’Albergo. L'après-midi, difficile de
se retrouver dans de telle profusion d'architectures, de villas, d'églises, de
palais. De pistes cyclables en routes et en ponts, je débouche par miracle sur
l
le
superbe amphithéâtre où les gladiateurs s'affrontaient, les chrétiens livrés aux
fauves, me dit Simone. Aujourd'hui, ce sont les touristes qui l'assaillent.
Panem et circenses, toujours d'actualité. Une colline, le mont Palatino ? Où il
y a une fête, des Mexicains ? Au hasard de ses rues bondées de monde, la
gigantesque fontaine de Trevi. Magnifico. À la nuit tombée, la foule devant ses
eaux jaillissantes et ses géants et leurs chevaux ailés prêts à y plonger. Des
fleurs dans le bassin pour l'amour, la passion ? À la trattoria Tritone,
Cantare, Sole mio s'élève comme un chant d'amour dans la nuit romaine.
Lundi 7 juillet, pas facile de s'habituer à ce rythme spartiate dans
cette auberge de jeunesse un peu caserne. Ce matin, déjà levé de bonne heure,
deux siciliens dans la chambrée, couché après moi, levés avant, comment
font-ils ? Visite de San-Pietro,. Quel gigantisme, quelle pompe en entrant des
statues gigantesques orne la nef immense, les dômes au-dessus des chapelles
latérales, les baldaquins sombres aux colonnes torsadées, le tombeau de
Saint-Pierre, la voûte centrale en demi-cercle. Tout y est grandiose. Escalade
du dôme par les escaliers à pied, ça donne le tournis tellement le manège est
sans fin. En haut, on domine le choeur où les fidèles semblent des fourmis.
Tout autour, des fresques, des mosaïques, quelle finesse, représentant des
angelots.
TV ES PETRUS ET SUPER HANC PETRAM AEDIFICABO ECCLESIAM MEAM ET TIBIDABO CLAVES REGNI CAELORUM
Ecrit tout autour
Des
cercles concentriques en même temps que des arcs menant à leur centre comme
l'oeil de Pierre, l'oeil de Dieu donne le vertige et nous mène au ciel. Jésus,
Marie et les apôtres et puis les saints et puis les anges et puis le souffle de
Dieu et puis les étoiles.
Lungodere,
un îlot de verdure le long du Tibre, un espace encore sauvage, un drapeau gay à
l'entrée, des arbres, un peu de vent, la terrasse donnant sur le Tibre. On
n'est plus à Rome, on est sur une péniche importée par les alizés. Dommage
qu'il y ait une télé pour casser cette image d'harmonie et couvrir le bruit des
cigales et des mouettes. Et il est arrivé, le grand échassier, le visage émacié
creusé par l'effort sous les cheveux blancs, Suard, luisant de transpiration.
Alors, le train hollandais Jan arrive toujours à l'heure. Eh Jean-Pierre ! me
hèle-t-il avec un fort accent traversant la voie inondée de voitures. Il faut
faire une fête, c'est ma partie ce soir, me lance-t-il. À
Mardi 8 juillet, dormi par fractions successives dans la chaleur et
le bruit Jan pressé de visiter San-Pietro,. De nouveau, sur
Arrêt
pizza dans un square sombre Fonte Piazza. C'est nuit noire sur la piste
cyclable, je me rentre.
Mercredi 9 juillet, en partant de l'auberge de
jeunesse vers Termini, un dernier tour vers
Arrivederci Trevi !